Luz y Caballero, Psicología [Psychologie]

Essais Philosophiques CubainsJosé de la Luz y Caballero, Aforismos

Psicología – Psychologie

La Psychologie et la Physiologie sont la même science.
Comment on doit comprendre le spiritualisme et le matérialisme.

Ces gens qui se passent de la physiologie font toujours des erreurs. Parce qu’elle n’est pas encore arrivée là où elle devrait : parce qu’il s’agit là d’une science prétentieuse et non élevée. Plus de l’étude de la nature, M. Girardin1 !

Les Chinois comparent les nerfs aux métaux. La respiration au feu, les os au bois. Que de vérité dans ces analogies si anciennes pour eux, confirmées par la science européenne moderne !

Impossibilité de percer l’homme dans l’homme.
Tout est présage : tout est clair-obscur, en
barlume2 – lueur.
Mobilité de la pensée. Versatilité. Variabilité.

Rigoureusement parlant, il n’existe pas de spontanéité dans l’exercice de nos facultés intellectuelles : il y a toujours une raison préalable qui détermine la pensée. Ce qui ne s’oppose pas à ce qu’il y ait des notions auxquelles l’entendement parvient immédiatement, et d’autres qu’il n’obtient que par la réflexion.

Le moi n’est rien de plus qu’un phénomène de l’intelligence, et il se manifeste dans les sensations aussi bien que dans les volitions : il n’est ni plus ni moins que ce qu’on considère généralement comme étant l’expression de la personnalité ; sans que cela n’empêche d’être considéré comme sujet et comme cause.

La raison est l’homme, le reste est l’animal.
La raison est le trait distinctif de l’homme ; la sensibilité est la condition pour l’exercice de ses facultés.

Lorsqu’il s’agit simplement de retenir des idées, le raisonnement sera toujours le meilleur allié de la mémoire.

Au milieu du royaume des êtres, il y a un Soleil qui porte et contient tout, qui meut et vivifie tout ; et il y a un œil de nature solaire, formé par ce Soleil. Le Soleil est Dieu : l’œil, l’âme. (Histoire de l’âme de Schubert3, Introduction.)
En recevant de la nourriture et des soins, le nourrisson reconnaît la mère aimante, et ainsi il grandit et se fortifie. De la même manière, l’âme, recevant la vie de l’origine de la vie, apprend qui est Dieu et reste renforcée pour la vie éternelle. (Schubert — allemand ; il va sans dire.)

La force de la volonté. Elle nous montre les moyens d’action inconsciemment. Ressentir intimement. Cela explique que “la connaissance n’est rien d’autre que se souvenir” de Platon4, comme l’embryon inconscient dans la mère consciente. Stahl5 [dit] que “l’âme est ce qui proprement forme et développe l’organisme”.

Il y a une force motrice plus puissante que la vapeur et l’électricité : la volonté ; mais ni celle-ci ni aucune autre ne peuvent faire de miracles sans la concentration et l’isolement.

Être plus ou moins fécond, plus ou moins enclin à la pensée, dépend très principalement de l’état des organes : par conséquent des causes physiques ou morales qui les altèrent.
La volonté et ses phénomènes. Distinguer ceux de la volonté de ceux de l’instinct. Quand nous voulons réellement – en résistance à l’instinct – quand nous n’y sommes pas incités – parce qu’il y a une volonté apparente, superficielle.

Pourquoi la mauvaise humeur d’autrui nous indispose-t-elle, même lorsqu’elle est considérée comme une véritable maladie physique ou un grain de folie ? Parce que le venin ne cesse jamais de tuer, qu’il vienne des mains du fou ou du sage.
Parce qu’en entendant bien le patient discourir, nous ne pouvons pas nous faire violence en le considérant comme déséquilibré, et peu importe que nous le considérions ainsi avec notre esprit, le sentiment y résiste toujours.
Il est vrai que la réflexion soulage, mais elle n’évite pas le dommage physique provoqué par la mauvaise humeur.
Cependant, la grande ressource, l’unique, est l’exercice de la réflexion.
Penser à toutes les matières et surtout à la matière, seule recette efficace. Si cela fait défaut chez certains, ils sont incurables.
Quand je dis réfléchir, j’inclus en première ligne ce qui sèche véritablement les larmes, la Religion, et surtout la religion chrétienne. Une âme chrétienne n’est jamais inconsolable.
Celui qui ne se jette pas hors du monde par la contemplation n’est pas consolé.
Il faut, sans quitter le monde avec le corps, vivre dans le sanctuaire des âmes.

Pour autant que l’homme se propose de ne pas se laisser exciter, comme il est composé de tant d’éléments différents, il finit souvent mortifié par ce qui se trouve être son contraire. Le potassium s’enflamme sous l’eau.

Prioritairement, un habitant de la terre s’entendra avec un locataire des étoiles plutôt que l’homme robuste avec le nerveux. Ah, profond Virgile, avec ton non ignara mali miseris succurrere6.
Et encore moins le religieux ou l’enthousiaste avec l’incrédule ou le calculateur.

Les fluides sont plus expansibles que les solides. (Loi de la physique et de la morale, qui ne faillit pas.)

Même l’image de la douleur est souvent attractive : celle de la contrariété jamais.
Mais la contrariété est peut-être la première des douleurs.
Elle est, cependant, si repoussante que même les plus imprégnés de cette idée l’éloignent et la font fuir.
C’est un véritable acte de vertu que d’entreprendre la consolation de celui qui est contrarié, surtout quand il n’y a ni amour ni peur.

La léthargie mentale dépend presque toujours de l’état physique (celui-ci peut presque être ôté), car même si elle a une autre cause lointaine d’un autre genre, elle se loge toujours dans un état physique.

1. (La conclusion de Jouffroy7 sur le sommeil.) Cela ne prouve pas ce qu’il prétend, mais que quand nous dormons nous sommes vivants.
2.
Ahrens8 (Leçon 8) a fait une arborescence des phénomènes du sommeil : elle est sans doute complète ; mais elle ne lie ni ne délie : elle n’explique pas.

Le sommeil est un état particulier qui ne s’explique pas uniquement par les circonstances extérieures.

Le sommeil : faire fonctionner la vie de relations en guise de vie organique.
La dépendance des sens et de l’esprit est très proche et non comme le prétendent les psychologues (si séparée, si lente).
Ils exposent, parfois, comme des causes ce que sont les effets.
Le cerveau s’endort généralement en premier, avant les sens externes.

La méditation participe du sommeil et de la veille. C’est éminemment la veille de l’âme.
Le sommeil pour les fonctions organiques et pour rétablir les fonctions relationnelles. C’est le ressort de l’horloge.
Il s’agit donc, éminemment, de la vie du corps.
C’est pourquoi il n’y a pas de gouvernement, même pas pour l’esprit – c’est pourquoi même celui-ci opère alors de manière organique ou mécanique.
C’est seulement ainsi que les phénomènes peuvent se comprendre et s’expliquer.
« La nuit porte conseil. »
Cela signifie non seulement le recueillement de la réflexion, mais aussi l’
élaboration d’idées, qui se produit généralement pendant le sommeil.
Car il arrive souvent qu’une idée se développe dans le rêve, qui était en germe avant lui, et parfois même sans en avoir connaissance, nous nous retrouvons avec elle au réveil, sans savoir comment.
Des lois, des lois de
9

Le sommeil, image de la mort en apparence, source de vie en réalité.
Le sommeil est une véritable fonction, un état d’activité pour l’organisme, et non un état négatif de simple réparation, comme on le croit généralement.
J’incline à croire qu’il a même son organe spécialement assigné.
Ni les psychologues ni les physiologistes n’ont vu tout ce qu’il y a dans le sommeil.
Nous ne voulons pas dire avec la proposition précédente que tous les organes ne manquent pas de s’endormir graduellement, mais qu’il en existe un spécialement conçu pour déterminer tous les phénomènes du sommeil.
Mourir, c’est dormir “surtout dans l’avenir” ; « Perchance to dream
10« !
Le rêve, signe de vie et image de la mort.

Ahrens a fouillé dans quelques livres de sciences naturelles – il ne les a pas étudiés – pour écrire sa psychologie. Infirmité courante des psychologues.
Dire que le point de vue de Lavater
11 est supérieur à celui de Gall12 ! Quelle absurdité !

Comme Ahrens est embrouillé et embrouillant dans presque toute la 7e leçon, sur la physionomie et la phrénologie ! Il n’est donc pas étrange que la jeunesse, et même les hommes dépourvus de critères et de connaissances approfondies, ne sachent pas à quoi s’en tenir.

Mais l’induction de Gall ébranle encore plus facilement, si cela est possible, la charge matérialiste, puisque l’unité du principe cogitant ne doit pas être plus attaquée avec la multiplication d’organes cérébraux qu’elle ne le serait avec l’existence d’organes sensoriels externes.

Dans le magnétisme animal, on voit comment certains philosophes “noient le poisson13”.
Je fais allusion au fait qu’ils veulent déjà déduire quel sera l’état de l’âme après la mort.

Bibliographie

LUZ Y CABALLERO J. (de la), Obras – Aforismos, La Habana, Ediciones Imagen Contemporánea, 2001.


Traduction et annotations : Patrick Moulin, MardiPhilo.fr, avril 2024.

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Notes

  1. Il s’agit peut-être de Marc Girardin, dit Saint-Marc Girardin (1801-1873), universitaire, critique littéraire et homme politique français. ↩︎
  2. Barlume : mot italien signifiant lueur. ↩︎
  3. Gotthilf Heinrich von Schubert (1780-1860) est un naturaliste allemand. C’est l’un des premiers représentants du courant romantique de la psychologie. ↩︎
  4. Voir la notion de Réminiscence dans le Carnet de vocabulaire philosophique. ↩︎
  5. Georg Ernst Stahl (1659-1734) est un médecin et chimiste allemand, promoteur d’un système médical, l’animisme de Stahl, qui en fait un précurseur du vitalisme médical ; et d’une théorie chimique erronée, celle du phlogistique. ↩︎
  6. Non ignara mali miseris succurrere disco : “N’ignorant point le malheur, j’ai appris à secourir les malheureux.” (Virgile, Énéide, Chant I). Cf. Luz y Caballero, Ética I.2. Valores positivos – Éthique I.2. Valeurs positives. ↩︎
  7. Simon Joseph Théodore Jouffroy (1796-1842) est un philosophe et homme politique français. Il développe au début du XIXe siècle la question psychologique au sein de l’école éclectique française dirigée par Victor Cousin. ↩︎
  8. Heinrich Ahrens, de nationalité hanovrienne (1808-1874) est un juriste et un philosophe, professeur à l’Université libre de Bruxelles où il enseigna de 1834 à 1848 la philosophie du droit, l’anthropologie et l’introduction à la psychologie. ↩︎
  9. Texte interrompu (note n° 6, p. 171). ↩︎
  10. Perchance to dream : “peut-être rêver”, citation extraite du monologue “To be or not to be” de Hamlet de Shakespeare (Acte III, scène 1). ↩︎
  11. Johann Caspar Lavater (1741-1801) est un penseur, théologien, poète et écrivain suisse de langue allemande. Il s’est surtout fait connaître pour son ouvrage sur la physiognomonie, publié en allemand à partir de 1775 et traduit en français à partir de 1781. ↩︎
  12. Franz Joseph Gall (1758-1828) est un médecin allemand naturalisé français en 1819, considéré comme le père fondateur de la phrénologie, qui visait à déceler les facultés et les penchants des hommes par la palpation des reliefs du crâne. ↩︎
  13. Expression originale “arriman la braza a su sardina” : littéralement, “ils approchent leur sardine à la brasse”. ↩︎

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