Poésie – Giacomo Leopardi, Il pensiero dominante [La Pensée dominante]

Giacomo Leopardi, Canti

Cet âge vaniteux Qui se repaît de vides espérances, Aime les contes et hait la vertu ; Cet âge sot qui adore l’utile Et ne voit point la vie Se faire chaque jour plus inutile.

Poésie – José Lezama Lima, Pabellón del vacío [Le Pavillon du vide]

(source : https://www.march.es/es/coleccion/biblioteca-julio-cortazar/)

L’aridité dans le vide, est-ce le premier et le dernier chemin ? Je m’endors, dans le tokonoma j’évapore l’autre qui continue à cheminer.

Poésie – Jean de la Croix (Juan de la Cruz), Noche oscura (Canciones del alma) [Nuit obscure (Chansons de l’âme)]

Jean de la Croix, Nuit obscure

Dans une nuit obscure d’une fièvre d’amour tout embrasée ô joyeuse aventure dehors me suis glissée quand ma maison fut enfin apaisée...

Poésie – Pablo Neruda, No hay olvido (Sonata) [Il n’y a pas d’oubli (Sonate)]

Pablo Neruda, Résidence sur la terre

Si vous me demandez où j’étais je dois dire : “Il arrive que”. Je dois parler du sol que les pierres obscurcissent, du fleuve qui en se prolongeant se détruit : je ne connais que les choses perdues par les oiseaux, la mer laissée en arrière, ou ma sœur qui pleure.

Poésie – Pablo Neruda, Trabajo frío [Travail froid]

Pablo Neruda, Résidence sur la terre

Dis-moi, du temps, résonnant dans ta sphère partielle et douce, entends-tu, par hasard, le sourd gémissement ?...

Poésie – José Lezama Lima, María Zambrano

(source : https://www.march.es/es/coleccion/biblioteca-julio-cortazar/)

Elle a des chats réfrigérants et des chats thermiques, ces fantômes élastiques de Baudelaire la regardent si minutieusement que c’est craintivement que María commence à écrire...

Poésie – Hugo Jamioy Juagibioy, Escarba las cenizas [Fouille les cendres]

JAMIOY JUAGIBIOY H., Danzantes del viento, Bogotá, Biblioteca Básica de Cultura Colombiana, 2017.

Enfant, le fourneau d’où tu as détaché ton nom est à l’abandon tandis que dans le froid tu cherches un abri extérieur à ta propre énergie...

Poésie – Miguelángel López Hernández (Vito Apüshana), Vivir – morir [Vivre – mourir]

Miguelángel López Hernández (Vito Apüshana) (source : https://www.abisiniareview.com/en-las-hondonadas-maternas-de-la-piel/)

Nous croissons, comme des arbres, à l'intérieur de la trace de nos aïeux....

Poésie – José Lezama Lima, Muerte de Narciso [La mort de Narcisse]

José Lezama Lima, Muerte de Narciso (source : https://linkgua-ediciones.com/producto/muerte-de-narciso/)

Danaé tisse le temps doré au bord du Nil, enveloppant les lèvres qui passaient parmi les lèvres et les vols déliés. La main ou la lèvre ou l'oiseau blanchissaient. C'était le cercle dans la neige qui s'ouvrait...

Poésie – Fredy Chikangana (Wiñay Mallki), Puñado de Tierra [Poignée de terre]

Fredy Chikangana (source : https://www.worldliteraturetoday.org/author/fredy-chikangana)

On m’a donné une poignée de terre pour que j’y vive. On m’a dit : “Prends, ver de terre : c’est là que tu cultiveras, que tu élèveras tes enfants, que tu mâcheras ton maïs béni.”...

Diccionario del Pensiamento Martiano – Noche [Nuit]

José Martí, Diccionario del Pensiamento Martiano

Qui n’a pas pleuré dans les solitudes de la nuit ? Tout rayon de Lune est esprit, toute teinte douce est pureté, tout murmure des arbres est vie : tout mouvement de la nuit est force vive de l’âme universelle.

Poésie – José Lezama Lima, Esperar la ausencia [Attendre l’absence]

(source : https://www.march.es/es/coleccion/biblioteca-julio-cortazar/)

Dans la nuit attendre une visite ou ne rien attendre et voir que le fauteuil avance lentement et s’éloigne de la lampe...

José Lezama Lima (1910-1976)

José Lezama Lima (source Wikimedia Commons)

José Lezama Lima a publié deux romans dont le plus connu est Paradiso, des recueils de poésie et des essais. Plusieurs anthologies lui sont consacrées. Il décrit lui-même l’unité de son œuvre : “Tout est un. Mon univers commence par la poésie, continue par l’essai et débouche sur le roman. Il n’y a pas de compartiment étanche entre ces trois choses, car les trois contribuent à une même forme d’expression.”

Poésie – Lucid Beausonge, Lettre à un rêveur

Lucid Beausonge, Lettre à un rêveur

Lettre à un rêveur qui s'ignore Qui jongle avec les "faudrait" et les "y a qu'à" Retourne coucher dans son décor Quand le réel reprend ses droits Vendez-moi une île déserte...

José Lezama Lima, Confluencias [Confluences]

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

J'ai vu la nuit comme si quelque chose était tombé sur la terre, une descente. Sa lenteur m'empêchait de la comparer à quelque chose qui descendait un escalier, par exemple. Une marée sur une autre marée, et ainsi sans cesse, jusqu'à ce qu'elle se mette à la portée de mes pieds. La tombée de la nuit s’unissait à l’unique étendue de la mer.

Poésie – Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, “Un baiser, mais à tout prendre, qu’est-ce ?”

Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac

Un baiser, mais à tout prendre, qu’est-ce ? Un serment fait d’un peu plus près, une promesse Plus précise, un aveu qui veut se confirmer, Un point rose qu’on met sur l’i du verbe aimer...

Poésie – Arthur Rimbaud, Sensation

Arthur Rimbaud, Poésies complètes

Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers, Picoté par les blés, fouler l'herbe menue : Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds. Je laisserai le vent baigner ma tête nue...

José Lezama Lima, Saint-John Perse : historiador de las lluvias [Saint-John Perse : historien des pluies]

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

La pluie, dans le poème de Saint-John Perse, pour le considérer rapidement dans ses domaines, étoile de mer, méduse dans l’ouïe, accordéon liquide, poème, la pluie est comme la preuve qui accompagne les royaumes. Il semble que chaque type d’aimantation ait non seulement la reconnaissance des pluies, mais aussi qu’elles seraient comme sur le point d'engendrer une descendance titanesque. La pluie est comme une peau, une substance pour provoquer une évaporation, un ambre à la rotation enivrante.

Poésie – Pierre Reverdy, Les vides du printemps

Pierre Reverdy, Plupart du temps

En passant une seule fois devant ce trou j’ai penché mon front Qui est là Quel chemin est venu finir à cet endroit Quelle vie arrêtée Que je ne connais pas...

José Lezama Lima, Las eras imaginarias : la biblioteca como dragón [Les ères imaginaires : la bibliothèque comme dragon] – Seconde partie

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

Ainsi, chaque bibliothèque est la demeure du dragon invisible, elle s’appuie sur la tortue à la carapace lisible. Avec la fragilité du bambou, père du papier, on trace la ligne étendue et la ligne brisée, conjuguant le masculin et le féminin. L'empereur, au centre de la maison du calendrier, est l'égal du lecteur silencieux du Livre des Mutations, le livre des livres de la culture chinoise, où le changement est figé et soufflé dans l'inerte. Et quand il meurt, le Livre conseille de placer dans sa bouche une coquille, qui le transformera en hirondelle.

Poésie – Apollinaire, Automne malade

Apollinaire, Alcools

Automne malade et adoré Tu mourras quand l'ouragan soufflera dans les roseraies Quand il aura neigé Dans les vergers...

José Lezama Lima, Las eras imaginarias : la biblioteca como dragón [Les ères imaginaires : la bibliothèque comme dragon] – Première partie

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

De cette manière le taoïsme chinois avait réalisé avec une simple feuille dorée une immense composition. Il avait réalisé un grand exploit dans la coutume, dans le pavillon où il dit au revoir à la nuit et inaugure le jour. Il réussit ainsi à ce que le tronc ne soit pas greffé dans la terre, mais dans l'eau, esprit des mutations.

Poésie – Esperanza Ortega, En la hora desnuda [À l’heure nue]

Esperanza Ortega, Lo que va a ser de ti

À l'heure nue Seulement cela Une seconde de lumière et de paradis...

José Lezama Lima, Las eras imaginarias : los egipcios [Les ères imaginaires : les Égyptiens]

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

Il fut donc fatal que l'Égyptien ait eu une idée si proche de la mort, là où la mort dans l'étendue terrestre était à ses côtés, se rendait à lui ou l’assaillait. Pour l’Égyptien préhistorique, la mort n’était pas l’autre vie, mais l’autre terre, qui n'était même pas une zone fixe et invariable, face à laquelle il n'y avait pas de place pour des formes défensives répétées, mais plutôt une zone qui oscillait au gré des caprices des inondations. La vie ne parvenait juste qu'à être une forme de pénétration dans le désert, du triomphe de la terre noire sur la terre rouge, du limon, qui n'est pas encore terre, pénétrant dans le sable, le squelette de la terre aspirée par le soleil.

Poésie – Pierre Reverdy, Droit vers la mort

Pierre Reverdy, Plupart du temps

Le matin allait à peine ouvrir son œil Sur la route où passaient les hommes gigantesques Seul il roulait sa boule parmi les yeux indifférents Toute sa peine est étrangère aux autres et lui ne cherche pas à savoir s'ils en ont...

José Lezama Lima, Introducción a los vasos órficos [Introduction aux vases orphiques]

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

De la plage, surgissant des rochers, commencent à jaillir des chevaux volants, comme une épée arrachant aux rochers des toiles magiques. Un air de flûte commence à dérouler une chansonnette recueillie par Orphée, tandis que s'éloignent les porteurs de thyrse. La chanson d'Orphée, la flûte panide et les coqs éleusiniens détruisent le sombre manteau de l'ennemi de Psyché. Le chœur répond : savoir son non-savoir est le nouveau savoir...

Poésie – Raúl Zurita, Diálogo con Chile [Dialogue avec le Chili]

Source : Aninat, Galeria de Arte

Tu verras une mer de pierres Tu verras des marguerites dans la mer Tu verras un Dieu de la faim Tu verras la faim...

José Lezama Lima, La imagen histórica [L’image historique]

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

Ô mon âme, tente juste l'impossible, dirons-nous en agrandissant le revers de la phrase de Pindare, et conduis la Poésie à la résurrection, puisque la connaissance possible s’est convertie en Ouroboros et danse comme le serpent devant la flûte du Malin.

Poésie – Giacomo Leopardi, Alla luna [À la lune]

Giacomo Leopardi, Canti

Ah ! qu’il est doux, Au temps de la jeunesse, quand le cours de l’espoir Est encor long, bref celui de la mémoire, De se ressouvenir des choses du passé Quand même elles sont tristes, et que la peine dure.

José Lezama Lima, A partir de la poesía [À partir de la poésie]

José Lezama Lima, Las Eras Imaginarias

Ange de la Jiribilla, prie pour nous. Et souris. Fais que cela arrive. Montre une de tes ailes, lis : Réalise-toi, accomplis-toi, sois antérieur à la mort. Veille sur les cendres qui reviennent. Sois le gardien du potens étrusque, de la possibilité infinie. Répète : L’impossible en agissant sur le possible engendre un possible dans l’infini. Et l’image a créé une causalité, c’est l’aube de l’ère poétique parmi nous. À présent nous pouvons pénétrer, ange de la Jiribilla, dans la sentence des Évangiles : “Nous portons un trésor dans un vase d’argile.”