José Martí, La Edad de Oro – I.6.1. La Ilíada, de Homero [L’Iliade, d’Homère] – Première partie

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Philosophie – Fiches de lecture

Fiches de lecture n° 36-1-6-1 – José Martí, La Edad de Oro – La Ilíada, de Homero [L’Iliade, d’Homère] – Première partie


Sommaire

Présentation générale
Premier numéroSecond numéroTroisième numéroQuatrième numéro


La Ilíada, de Homero [L’Iliade, d’Homère]


Première partieSeconde partie*

Première partie

Il y a deux mille cinq cents ans, le poème de l’Iliade était déjà célèbre en Grèce. Certains disent qu’il a été composé par Homère, le poète aveugle à la barbe bouclée, qui allait de ville en ville en chantant ses vers au rythme de la lyre, comme le faisaient alors les Aèdes. D’autres disent qu’Homère n’a jamais existé, mais que le poème a été composé par différents chanteurs. Mais il semble que cela ne puisse pas être le travail de plusieurs, dans un poème où la façon de parler, de penser ou d’écrire les vers ne change pas, et où du début à la fin le caractère de chaque personnage est si clair qu’on peut dire qui il est selon ce qu’il dit ou ce qu’il fait, sans avoir besoin de lire son nom. Il n’est pas non plus probable qu’un même peuple ait disposé de beaucoup de poètes pour composer des vers avec autant de sens et de musique que ceux de l’Iliade, sans mots manquants ou qui soient de trop ; ni que tous les différents chanteurs aient eu la sagesse et la grandeur des chansons d’Homère, où il semble que c’est un père qui parle.

L’Iliade ne raconte pas toute la guerre de trente ans de la Grèce contre Ilion, ce qu’ils appelaient Troie à l’époque ; mais ce qui passé pendant la guerre quand les Grecs étaient encore dans la plaine, prenant d’assaut la ville fortifiée, et que la jalousie opposait deux Grecs célèbres, Agamemnon et Achille. Agamemnon était appelé le Roi des Hommes, et il était comme un roi majeur, qui avait plus d’autorité et de pouvoir que tous les autres rois qui venaient de Grèce pour lutter contre Troie, lorsque le fils d’un roi troyen, le vieux Priam, enleva sa femme à Ménélas, qui était le roi d’une des villes de Grèce, et était le frère d’Agamemnon. Achille était le plus vaillant de tous les rois grecs, et un homme aimable et cultivé, qui chantait à la lyre les histoires des héros, et qui gagnait jusqu’à la sympathie des esclaves qu’il recevait comme butin, lorsque les prisonniers étaient distribués après les victoires. Les rois se disputèrent pour une prisonnière, car Agamemnon renâclait à rendre au prêtre troyen Chrysès sa fille Chryséis, bien que le prêtre grec Calcas lui ait dit qu’il fallait la rendre pour que dans l’Olympe, qui était le ciel de cette époque, se calme la fureur d’Apollon, le dieu du Soleil, qui était en colère contre les Grecs parce qu’Agamemnon retenait captive la fille d’un prêtre : et Achille, qui n’avait pas peur d’Agamemnon, se leva parmi tous les autres, et dit que il fallait faire ce que Calchas voulait, pour que cesse le fléau de la canicule qui était en train de tuer massivement les Grecs, et qui était si immense qu’on ne voyait jamais le ciel s’éclaircir, à cause de la fumée des bûchers sur lesquels brûlaient les cadavres. Agamemnon dit qu’il délivrerait Chryséis, si Achille lui donnait Briséis, la captive qu’il gardait dans sa tente.  Achille traita Agamemnon de “sac à vin aux yeux de chien et au cœur de cerf”, et il sortit l’épée à poignée d’argent pour le tuer devant les rois ; mais la déesse Minerve, qui était invisible à ses côtés, lui retint la main, quand son épée fut à moitié tirée. Achille jeta au sol son sceptre d’or, s’assit et dit qu’il ne combattrait plus pour les Grecs avec ses braves myrmidons, et qu’il s’en allait dans sa tente. 

Ainsi commença la colère d’Achille, comme le raconte l’Iliade, depuis qu’il s’irrita dans cette dispute, jusqu’à ce que son cœur se mette en furie lorsque les Troyens tuèrent son ami Patrocle, et qu’il partit pour combattre à nouveau contre Troie, qui était en train de brûler les navires des Grecs et les avait presque vaincus. Il suffit qu’Achille donne de la voix depuis la muraille, pour que l’armée de Troie soit repoussée, comme la vague emportée par une bourrasque de vent, et que tremblent les genoux des chevaux troyens. Le poème entier est écrit pour raconter ce qui est arrivé aux Grecs depuis qu’Achille a été offensé : – la dispute des rois, – le conseil des dieux de l’Olympe, où les dieux décidèrent que les Troyens vaincraient les Grecs, comme châtiment de l’offense faite à Achille par Agamemnon , – le combat de Paris, fils de Priam, avec Ménélas, l’époux d’Hélène, – la trêve qui eut lieu entre les deux armées, et la façon dont l’archer troyen Pandare la rompit par sa flèche décochée à Ménélas, – la bataille du premier jour, où le vaillantissime Diomède failli tuer Énée d’une pierre, – la visite d’Hector, le héros de Troie à son épouse Andromaque, qui le vit combattre depuis la muraille, – la bataille du deuxième jour, dans laquelle Diomède s’enfuit sur son char de combat, poursuivi par Hector vainqueur, – l’ambassade que les Grecs envoyèrent à Achille, afin qu’il revienne les aider à nouveau dans les combats, parce que depuis qu’il ne se battait plus, les Troyens étaient en train de gagner, – la bataille navale, dans laquelle le même Ajax ne put défendre les navires grecs contre l’assaut, jusqu’à ce qu’Achille consente que Patrocle combatte avec son armure, – la mort de Patrocle, – le retour d’Achille au combat, avec la nouvelle armure que lui avait fait le dieu Vulcain, – le défi d’Achille et d’Hector , – la mort d’Hector, – et les supplications par lesquelles son père Priam parvint à ce qu’Achille lui ramène le cadavre, pour le brûler à Troie sur le bûcher d’honneur, et à garder les os blancs dans une boîte d’or. Ainsi Achille s’irrita, et ce furent les événements de la guerre, jusqu’à ce que cesse sa colère.

Achille n’est pas dépeint par le poème comme l’enfant d’un homme, mais de la déesse de la mer, Thétis. Et ce n’est pas très surprenant, car encore aujourd’hui les rois disent que le droit de gouverner les peuples leur vient de Dieu, ce qu’ils appellent “le droit divin des rois”, et ce n’est rien de plus qu’une vieille idée de ces temps de combat, où les peuples étaient jeunes et ne savaient pas vivre en paix, comme les étoiles vivent dans le ciel, toutes ayant de la lumière même si elles sont nombreuses, et chacune brillant même si une autre se tient à côté. Les Grecs croyaient, comme les Hébreux et comme beaucoup d’autres peuples, qu’ils étaient la nation favorite du créateur du monde, et les seuls enfants du ciel sur terre. Comme les hommes sont orgueilleux, et qu’ils ne veulent pas confesser qu’un autre homme soit plus fort ou plus intelligent qu’eux, quand il y avait un homme fort ou intelligent qui devenait roi par son pouvoir, ils disait qu’il était le fils des dieux. Les rois étaient heureux que les peuples croient cela ; et les prêtres disait que c’était vrai, de sorte que les rois leur en étaient reconnaissants et les aidaient. Ainsi les prêtres et les rois commandaient ensemble.

Chaque roi avait sa parenté dans l’Olympe, et était fils, neveu, ou petit-fils d’un dieu, qui descendait du ciel pour le protéger ou le châtier, selon qu’il apportait aux prêtres de son temple beaucoup ou peu d’offrandes ; et le prêtre disait que le dieu était en colère quand le don était faible, ou qu’il était heureux quand beaucoup de miel et de moutons lui avaient été offert. C’est ainsi que l’on voit dans l’Iliade, qu’il y a comme deux histoires dans le poème, l’une sur la terre et l’autre dans le ciel ; et que les dieux du ciel sont comme une famille, seulement ils ne parlent pas comme des personnes bien élevées, mais se battent et s’insultent, comme les hommes dans le monde. Jupiter, le roi des dieux, restait toujours sans savoir quoi faire ; parce que son fils Apollon voulait protéger les Troyens, et sa femme Junon les Grecs, tout comme son autre fille Minerve ; il y avait d’énormes combats lors des festins célestes, Jupiter disait à Junon que cela allait mal se passer si elle ne se taisait pas tout de suite, et Vulcain, le boiteux, le sage de l’Olympe, riait des blagues et de la méchanceté d’Apollon, celui aux cheveux roux, qui était le dieu espiègle. Les dieux se levèrent et descendirent pour porter et transmettre à Jupiter les messages des Troyens et des Grecs ; ou alors ils combattirent sans qu’on les voit dans les chars de leurs héros favoris ; ou encore ils emportèrent leur héros dans leurs bras à travers les nuages ​​pour que le vainqueur ne finisse pas par le tuer, avec l’aide du dieu contraire. Minerve prit la figure du vieux Nestor, qui parlait avec la douceur du miel, et conseilla à Agamemnon d’attaquer Troie. Vénus délia le casque de Paris quand son ennemi Ménélas le fit chuter au sol en le tirant par le casque : et elle enleva Paris par les airs. Vénus emporta également dans ses bras blancs Enée, vaincu par Diomède. Dans une escarmouche, Minerve alla guidant le char de combat du Grec, et Apollo vint contre elle, menant le char de Troie. Une autre fois, quand par une ruse de Minerve, Pandare tira avec son arc sur Ménélas, la flèche terrible pénétra à peine dans la chair de Ménélas, parce que Minerve l’avait repoussée en tombant, comme lorsqu’une mère chasse une mouche du visage de son enfant. Dans l’Iliade, les dieux et les hommes étaient toujours ensemble, comme parents et enfants. Et dans le ciel, les choses se passaient de la même manière que sur la terre ; car ce sont les hommes qui inventent les dieux à leur ressemblance, et chaque peuple imagine un ciel différent, avec des divinités qui vivent et pensent de la même manière que les gens qui les ont créés et les adorent dans les temples : parce que l’homme se voit petit devant la nature qui l’a créé et qui le fait mourir, et qu’il ressent le besoin de croire en quelque chose de puissant, de le supplier de bien le traiter dans le monde, et de ne pas lui faire quitter la vie. Le ciel des Grecs était si semblable à la Grèce, que Jupiter lui-même était comme un roi des rois, une sorte d’Agamemnon, qui pouvait faire plus que les autres, mais ne faisait pas tout ce qu’il voulait, et qui devait écouter les Grecs et les contenter, comme Agamemnon eut à le faire avec Achille. Dans l’Iliade, même s’il n’y paraît pas, il y a beaucoup de philosophie, beaucoup de science et beaucoup de politique, et elle enseigne aux hommes, comme sans le vouloir, que les dieux ne sont en réalité rien de plus que des poésies issues de l’imagination, et que les pays ne peuvent pas être gouvernés par le caprice d’un tyran, mais par l’accord et le respect des dirigeants que le peuple choisit pour expliquer la façon dont il veut être gouverné.

Mais la beauté de l’Iliade est cette manière dont est dépeint le monde, comme si l’homme le voyait pour la première fois, et se déplace d’un côté à l’autre en pleurant d’amour, avec les bras levés, interrogeant le ciel qui peut tant, où est le créateur, et comment il a composé et maintenu tant de merveilles. Et une autre beauté de l’Iliade est la façon de dire les choses, sans ces paroles prétentieuses que les poètes utilisent parce qu’elles leur semble sonner bien ; mais avec des mots mesurés et forts, comme quand Jupiter consentit à ce que les Grecs perdent quelques batailles, jusqu’à ce qu’ils se repentent de l’offense qu’ils avaient faite à Achille, et “quand il dit ainsi, l’Olympe trembla”. Homère ne cherche pas des comparaisons entre des choses qui ne se voient pas, mais entre celles qui se voient : de façon que ce qu’il raconte ne soit pas oublié, parce que c’est comme s’il les avait tenues devant les yeux. C’était des temps de combats, où chaque homme devenait soldat pour défendre son pays, ou partait à l’attaque de ses voisins par ambition ou par jalousie ; et comme il n’y avait alors ni livres, ni théâtres, le divertissement était d’écouter l’Aède chanter sur la lyre les combats des dieux et les batailles des homme ; et l’Aède devait faire rire les gens avec les méchancetés d’Apollon et de Vulcain, pour que les gens ne se lassent pas du chant sérieux ; Et il leur parlait de ce que les gens écoutaient avec intérêt, qui étaient les histoires des héros et les récits des batailles, dans lesquelles l’Aède disait des choses de médecine et de politique, pour que le peuple trouve du plaisir et du profit à l’entendre, et qu’il donne une bonne rétribution et une bonne renommée au chanteur qui lui avait enseigné dans ses vers la façon de se gouverner et de se guérir. Une autre chose qui plaisait beaucoup aux Grecs était l’oratoire, et on considérait comme le fils d’un dieu celui qui parlait bien, ou qui faisait pleurer ou qui expliquait aux hommes. C’est pourquoi il y a dans l’Iliade tant de descriptions de combats, tant de guérisons de blessures et tant de harangues.

Tout ce que l’on sait des premiers temps des Grecs se trouve dans l’Iliade. En Grèce, ils ont appelé poètes les chanteurs qui allaient de ville en ville, chantant l’Iliade et l’Odyssée, qui est un autre poème où Homère raconte le retour d’Ulysse. Il semble qu’Homère ait composé plus de poèmes, mais d’autres disent que ce ne sont pas les siens, bien que le grec Hérodote, qui a recueilli toutes les histoires de son temps, rapporte des informations sur ces poèmes, et sur de nombreux vers isolés, dans la vie d’Homère qu’il a écrite, qui est la meilleure version des huit qui ont été écrites, sans qu’on sache avec certitude si Hérodote l’a réellement écrite, ou s’il ne l’a pas raconté à la hâte et sans réfléchir, comme il avait l’habitude d’écrire.

Première partie – Seconde partie*

* L’œuvre originale est en une seule partie.


Traduit de l’espagnol par Patrick Moulin @dsirmtcom.

Patrick Moulin, alias @dsirmtcom, avril 2021.

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