José Martí, La Edad de Oro – III.1.1. La exposición de París [L’exposition de Paris] – Première partie

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Philosophie – Fiches de lecture

Fiches de lecture n° 36-III-1.1. – José Martí, La Edad de Oro – La exposición de París [L’exposition de Paris]


Sommaire

Présentation générale
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Première partieSeconde partie


La exposición de París [L’exposition de Paris] – Première partie

Source : Wikipedia

Tous les peuples du monde se sont réunis en cet été 1889 à Paris. Jusqu’à il y a cent ans, les hommes vivaient comme esclaves des rois, ceux-ci ne les laissaient pas penser, et prenaient une grande partie de ce qu’ils gagnaient dans leurs métiers, pour payer des troupes pour aller combattre d’autres rois, et ils vivaient dans des palais de marbre et d’or, avec des serviteurs vêtus de soie, et des dames et des gentilshommes avec des plumes blanches, tandis que les vrais cavaliers, ceux qui travaillaient dans les champs et dans la cité, ne pouvaient s’habiller tout au plus qu’en velours, et ne pouvaient pas mettre une plume sur leurs chapeaux : et s’ils disaient qu’il n’était pas juste que des paresseux vivent de ce que gagnaient les travailleurs, s’ils disaient qu’un pays entier ne devait rester sans pain pour qu’un seul homme et ses amis aient des carrosses, des vêtements en lamé et en dentelle, et des dîners avec une quinzaine de vins, le roi ordonnait de les frapper à coups de bâton, ou il les enfermait vivants dans la prison de la Bastille, jusqu’à ce qu’ils meurent, fous et muets : et à l’un d’eux il lui ont mis un masque de fer, et il a été emprisonné toute sa vie , sans jamais soulever son masque. Dans toutes les villes, les hommes vivaient ainsi, avec le roi et les nobles comme maîtres, et les travailleurs comme des bêtes de somme, sans pouvoir parler, ni penser, ni croire, sans avoir quoi que ce soit à eux, parce que le roi enlevait leurs enfants pour [en faire] des soldats, et le roi prenait leur argent sous forme d’impôts, et les terres, le roi les a toutes donnés aux nobles. Le peuple de France fut courageux, le peuple qui s’est soulevé pour défendre les hommes, le peuple qui a pris le pouvoir au roi.

C’était il y a cent ans, en 1789. Ce fut comme si un monde s’achevait et qu’un autre commençait. Les rois se sont tous ralliés contre la France. Les nobles de France ont aidé les rois étrangers. Les travailleurs, seuls contre tous, se sont battus contre tous et contre les nobles, et les ont tués à la guerre et avec la lame de la guillotine. La France saignait alors, comme lorsqu’on ouvre un animal vivant et qu’on lui arrache les entrailles. Les travailleurs étaient furieux, ils s’accusaient les uns les autres et se conduisaient mal, parce qu’ils n’avaient pas l’habitude de gouverner. Un homme audacieux et ambitieux vint à Paris, il vit que les Français vivaient sans union, et quand il est parvenu à gagner toutes les batailles contre les ennemis, il a ordonné qu’on le nomme empereur, et il a gouverné la France comme un tyran. Mais les nobles ne sont plus revenus sur leurs terres. Ce roi d’or et de soie n’est jamais revenu. Les travailleurs se sont partagé les terres des nobles et celles du roi. Ni en France, ni dans aucun autre pays, les hommes ne sont redevenus aussi esclaves qu’avant. C’est ce que la France a voulu célébrer cent ans après avec l’Exposition de Paris. C’est pourquoi la France a choisi Paris, en été, quand le soleil brille le plus, pour tous les peuples du monde.

Source : Wikipédia.

Et c’est ce que nous allons voir maintenant, comme si nous l’avions devant les yeux. Nous allons à l’Exposition, à cette visite que sont en train de faire les races humaines. Nous allons voir dans le même jardin les arbres de tous les peuples de la terre. Au bord de la Seine, nous allons voir l’histoire des maisons, depuis la grotte de l’homme troglodyte, dans une crevasse du rocher, jusqu’au palais de granit et d’onyx. Nous allons monter, avec les Norvégiens à barbes rousses, avec les Noirs sénégalais aux cheveux laineux, avec les Annamites en chignons et turbans, avec les Arabes en babouches et en burnous, avec l’Anglais réservé, avec le Yankee jaloux, avec l’Italien raffiné, avec le Français élégant, avec l’Espagnol joyeux, nous allons monter au-dessus des plus hautes cathédrales, jusqu’à la coupole de la tour de fer. Nous allons voir dans leurs palais étranges et magnifiques nos peuples bien-aimés d’Amérique. Nous verrons, entre lacs et jardins, dans des monuments de fer et de porcelaine, la vie entière de l’homme, et tout ce qu’il a découvert et fait depuis qu’il a marché nu à travers les forêts jusqu’à ce qu’il navigue en haut des airs et dans les profondeurs de la mer. Dans un temple de fer, si large et si beau qu’il ressemble à un ciel doré, nous verrons toutes les machines et tous les rouages du monde travailler en même temps. D’en dessous de la terre, tel un volcan de joyaux, nous allons voir jaillir, en pluies aux allures de pierres fines, trois cents fontaines de couleurs, qui retombent en scintillant dans un lac rouge vif. Nous allons voir vivre, comme ils vivent dans leurs pays de lumière, le Javanais dans sa maison de roseaux, l’Egyptien chantant derrière son âne, l’Algérien qui brode la laine à l’ombre de la palmeraie, le Siamois qui travaille le bois avec les pieds et les mains, le Noir du Soudan, qui sort en jetant un coup d’œil, avec la lance pointue, de son lopin de terre, l’Arabe qui court à cheval, tirant au fusil, dans la rue des dattes, avec son burnous blanc au vent. Ils dansent dans un café maure. Les danseuses javanaises passent, avec leurs casques à plumes. Les comédiens de Cochinchine sortent de leur théâtre, vêtus de tigres. Les hommes de tous les peuples marchent étonnés par les rues mauresques, par les villages noirs, par le hameau de bambous javanais, par les ponts de roseaux des pêcheurs malais, par le jardin créole de bananiers et d’orangers, par le coin d’où, depuis son toit sculpté comme un meuble somptueux, la pagode dresse sa tour ceinte de serpents. Et pour nous les enfants, il y a un palais des jouets, et un théâtre où sont, comme vivants, le pirate Barbe-Bleue et le joli Petit Chaperon Rouge. On peut voir le pirate, sa barbe comme le feu, et ses yeux de lion. On peut voir le petit chaperon, son bonnet rouge et son tablier de laine. Cent mille visiteurs entrent chaque jour dans l’Exposition. Au sommet de la tour flotte au vent le drapeau tricolore de la République française.

La porte d’entrée du quai d’Orsay – Source : Las Ilustraciones de la Edad de Oro de José Martí 

On peut entrer dans l’exposition par vingt-deux portes. La belle entrée se fait par le palais du Trocadéro, en forme de fer à cheval, qui est resté d’une exposition précédente, et est maintenant plein de ces œuvres exquises qui ont été faites en argent pour les églises et les tables des princes et des bijoutiers, au temps de la cape et de l’épée, quand les assiettes étaient en or, et les coupes pour boire étaient comme des calices. Et du palais on sort dans le jardin, qui est la première merveille. Rien d’autre que des roses, il y en a quatre mille cinq cents différentes : il y a une rose presque bleue. Dans un magasin aux rayures blanches et rouges, des jeunes femmes vendent des sécateurs tranchants, des râteaux en acier poli, des arrosoirs en forme de jouets utilisés pour jardiner. Le terrain est en carrés, entouré de canaux d’irrigation, à travers lesquels coule de l’eau claire, faisant des carrés comme des îlots. L’un est plein de pensées noires ; un autre de fraises comme des coraux, cachés parmi les feuilles vertes ; et un autre de petits pois et d’asperges, qui donnent une très jolie feuille. Il y a un carré rouge et jaune, fait de tulipes. Un coin est fait de liserons, et celui à côté est de fougères gigantesques, avec des feuilles comme des plumes. Dans un labyrinthe flottent sur l’eau le nymphéa, le lotus rose de l’Hindoustan, et le lotus du Nil, qui ressemble à une lyre. Une forêt est faite de conifères : pin, sapin. Une autre est faite d’arbres défigurés, qui donnent peu de fruits, car ils enlèveraient leur liberté naturelle aux branches. A l’intérieur d’une haie de roseaux se trouvent les iris et les cerisiers du Japon, dans leurs jarres en porcelaine blanche et bleue. Au pied d’une palmeraie, aux murs faits d’autant de troncs qu’il y en a, se trouve le pavillon des Eaux et Forêts, où l’on voit comment il faut prendre soin des arbres, qui donnent beauté et félicité à la terre. A l’ombre d’un érable du Japon, on trouve, dans des coupes rustiques, le Wellingtonia du Nord [séquoia géant], qui est le pin le plus grand, et l’Araucaria, le pin du Chili.

Le palais des produits alimentaires – Source : Wikimédia

Par dessus un pont, on traverse le fleuve de Paris, la célèbre Seine, et on peut déjà voir de toutes parts les groupes de personnes étonnées, qui viennent des bâtiments sur les rives du fleuve [le palais des produits alimentaires], où se trouve la Galerie du Travail, et où ils cuisent les gâteaux dans un four énorme, ils distillent la liqueur dans l’alambic en bronze rouge, dans la machine à cylindre ils broient du chocolat avec du cacao et du sucre, et sur des plateaux chauds les pâtissiers aux bonnets blancs sont en train de faire des bonbons et des yemas (bonbons au jaune d’oeuf] : tout ce qui se mange est visible dans la Galerie, une montagne de sucre, un arbre de pruneaux, une colonne de jambons : et dans la salle des vins, un tonneau où pourraient tenir quinze convives à table, et une carte en relief, que tout le monde veut voir en même temps, où est tout l’art du vin, – la vigne avec les grappes, les hommes cueillant les raisins dans des corbeilles au mois des vendanges, la cuve où fermente la vigne écrasée, la cave froide où l’on fait reposer le moût, puis le vin pur, comme de la topaze fondue, et la bouteille d’où le Champagne jaillit avec sa mousse parfumée. À proximité se trouve toute l’histoire de la culture des champs, avec des modèles en relief, des tableaux et des livres ; un pavillon de charrues en acier reluisant ; une ruche d’abeilles mellifères, à côté de la feuille velue du mûrier dans laquelle se développe le ver à soie ; et les viviers de poissons, qui naissent des œufs emprisonnés dans des casiers d’eau, et sortent ensuite pour croître par milliers dans la mer et les rivières. Les plus en admiration sont ceux qui viennent de voir les quarante-trois Habitations de l’Humanité [voir La Edad de Oro, II]. La vie de l’homme est là depuis qu’il est apparu pour la première fois sur la terre, luttant avec l’ours et le renne, pour se mettre à l’abri du terrible gel avec leur peau, blotti dans sa grotte. C’est ainsi que naissent les peuples aujourd’hui. Le sauvage fait de même avec les grottes dans les bois ou les trous dans la roche : alors il voit que le monde est beau, il ressent le tendre désir d’offrir, il regarde son corps dans l’eau de la rivière, et commence à imiter tout ce qui lui paraît beau dans le bois et la pierre de ses maisons, son corps d’être humain, les oiseaux, une fleur, le tronc et la canopée des arbres. Et chaque peuple grandit en imitant ce qu’il voit autour de lui, construisant ses maisons comme le font ses voisins, montrant par ses maisons comment il est, s’il vient d’un climat froid ou chaud, s’il est pacifique ou combatif, s’il est artistique et naturel, ou vain et ostentatoire. Là se trouvent les cabanes de pierre brute, et plus tard [de pierre] polie, des premiers hommes : la cité lacustre de l’époque où ils bâtissaient les maisons dans le lac sur des piliers, pour que les fauves ne les attaquent pas ; les maisons hautes, carrées et légères, avec un mirador continu, des peuples du soleil qui étaient autrefois les grandes nations, la sage Egypte, la Phénicie marchande, l’Assyrie guerrière. La maison de l’Hindoustan est grande comme eux. Celui de Perse est déjà un château, fait de riche faïence bleue, car là-bas les pierres précieuses sortent du sol, et les fleurs et les oiseaux sont multicolores. Les maisons des Hébreux, des Grecs et des Romains, semblent familières, toutes en pierre, et basses, avec un toit ou une terrasse ; et on voit, par leurs similitudes, que les maisons étrusques et byzantines étaient de la [même] région. Dans le Nord de l’Europe vivaient alors Les Huns barbares, comme on peut le voir là, dans leur tente de marche ; ainsi que les Germains et les Gaulois, dans leurs premières maisons en bois, au toit de chaume. Quand les guerres ont réuni les peuples, la Russie eut cette maison d’ornements et de couleurs, comme la maison hindoue, et les barbares ont mis dans leurs grandes bâtisses la pierre taillée et gracieuse des Italiens et des Grecs. Puis, à la fin de l’âge intermédiaire entre ce combat et la découverte de l’Amérique, les goûts d’autrefois, ceux de la Grèce et de Rome, revinrent dans les demeures gracieuses et riches de la Renaissance. En Amérique, les Indiens vivaient dans des palais de pierre avec des décorations en or, comme celui des Aztèques du Mexique et celui des Incas du Pérou. On voit que le Maure d’Afrique, avec sa maison de pierre brodée, connaissait les Hébreux, et qu’il vivait dans des forêts de palmiers, se défendant de ses ennemis depuis la tour, voyant dans le jardin la gazelle parmi les roses, et dans le sable du rivage les caprices de l’écume de la mer. Le Noir du Soudan, avec sa maison au toit blanc entourée de liserons des bois, ressemble à un Maure. Le Chinois agile, qui vit de poisson et de riz, bâtit sa maison de planches et de bambous. Le Japonais vit de la sculpture de l’ivoire, dans sa maison de nattes et de planches. Là, on peut voir où vivent maintenant les peuples sauvages, l’Esquimau dans sa maison ronde en glace, l’Indien d’Amérique du Nord dans sa boutique aux peaux peintes : peintes d’animaux étranges et d’hommes au visage rond, comme ceux que  peignent les enfants.

La Tour Eiffel et les monuments les plus élevés du monde. La Ilustracion Artistica, 7 janvier 1889 – Source : memoriademadrid

Mais là où la foule se rend avec un silence respectueux, c’est vers la Tour Eiffel, le plus haut et le plus audacieux des monuments humains. C’est comme le portail de l’Exposition. Ses quatre pieds de fer partent de la terre, entourés par les palais : ils se rejoignent en arcade, et ils vont presque unis jusqu’au second étage de la tour, haute comme la pyramide de Khéops : de là, fine comme de la dentelle, vaillante comme un héros, fine comme une flèche, elle s’élève plus haut que le monument de Washington, qui était la plus haute des œuvres humaines, et elle s’enfonce, là où les yeux ne peuvent l’atteindre, dans le bleu, avec sa cloche, comme la tête des montagnes, couronnée de nuages. Et tout, de la racine au sommet, est un tissu de fer. A peine soutenue, elle s’est élevée dans les airs. Les quatre pieds mordent, comme d’énormes racines, dans le sol sablonneux. Vers le fleuve, où tombent deux de ses pieds, le sol était instable, ils ont creusé deux fosses, ils ont extrait le sable mou de l’intérieur et ils les ont remplis d’un ciment solide. Des quatre coins ils amorcèrent, comme pour les unir en hauteur, les quatre pieds robustes : les pièces les plus hautes, qui seraient tombées à cause de leur grande inclinaison, furent soutenues avec un échafaudage : sur quatre piliers de grosses planches fut élevée la première plate-forme, qui portait tout autour, comme une couronne, les noms des grands ingénieurs français : là dans les airs, par une belle matinée, ils encastrèrent les quatre pieds dans l’estrade, comme une épée dans un fourreau, et la tour se maintint sans soutènement : de là, comme des lances pointant vers le ciel, les vergues délicates sortirent : une grue était suspendue à chacune : là-haut les nouvelles pièces s’élevaient, en dansant dans l’air : les ouvriers, agrippés à la vergue avec leurs jambes comme un marin au cordage du navire, clouaient les rivets, comme quelqu’un qui met le pavillon de la patrie sur la hampe de l’ennemi : ainsi, couchés sur le dos, placés le visage face au vide, solidement attachés à la vergue que le vent secouait comme une branche, les ouvriers, en blouses et chapeaux de fourrure, ajustaient pendant l’hiver, dans le tourbillon de vent et de neige, les pièces en coins, les croisillons, les étais, et cette blonde [tour] percée s’élevait au-dessus de l’univers, comme si elle allait se raccrocher au ciel : dans leur navette de cordes les peintres se balançaient, avec le brosse de rouge dans les mains. Le monde entier va maintenant comme se mouvant dans la mer, avec tous les peuples humains à bord, et la tour sur le mât du navire du monde  ! Les vents se jettent sur la tour, comme pour renverser celui qui les défie, et ils s’enfuient à travers l’espace bleu, vaincus et mis en pièces. Là-bas les gens entrent, comme des abeilles dans la ruche : par les pieds du tour  deux mille visiteurs à la fois montent et descendent par l’escalier en colimaçon, et par les ascenseurs inclinés ; les hommes, comme des vers, rampent entre les mailles de fer ; le ciel se voit à travers le tissu comme dans de grands triangles bleus à la tête coupée, et aux pics aigus. Depuis le premier étage ouvert, avec ses quatre curieux hôtels, on monte l’escalier en hélice jusqu’au deuxième palier, où un journal est écrit et imprimé, à hauteur de la coupole de Saint Pierre. Le cylindre de la presse tourne : les journaux en sortent humides : on donne une médaille d’argent au visiteur. Les courageux montent jusqu’à la troisième plate-forme, à trois cents mètres au-dessus de la terre et de la mer, où on n’entend plus le bruit de la vie, et l’air, là-haut, semble se purifier et paraît effleurer : au-dessous la ville s’étend, muette et déserte , comme une carte en relief : vingt lieues du fleuve qui étincelle, de vallées illuminées, de montagnes d’un vert noirâtre, se voient à la longue-vue ; sur l’estrade s’élève la cloche où deux hommes, dans leur abri de cristal, étudient les animaux de l’air, la course des étoiles et le cheminement des vents. Depuis l’une des racines de la tour monte en zigzagant, à travers le fil de fer vibrant, l’électricité, allumant dans le ciel noir le phare qui répand sur Paris ses fleuves de lumière blanche, rouge et bleue, comme le drapeau du pays. Au sommet de la coupole, une hirondelle a fait son nid.

Palais des Arts Libéraux (vue en perspective) – Source : Wikimédia

Par dessous la tour on va, sans pouvoir parler de la surprise, vers des jardins pleins de fontaines, entourés de palais, et au fond le plus grand de tous, où est exposé tout le travail produit par l’humanité, avec une porte en fer forgé pleine de guirlandes, comme on travaillait autrefois l’or des riches ; et au-dessus de la grande porte, imitant la voûte céleste, le dôme de porcelaine luisante ; et dans la couronne, ouvrant ses ailes comme pour s’envoler, une femme qui porte dans le main un rameau d’olivier : à l’entrée du portique se tient, avec une main sur la tête d’un lion, la Liberté, en bronze. Et devant la grande fontaine, où vont à travers l’eau des hommes et des femmes dont les poètes d’autrefois disaient qu’il y en avait dans la mer, les Néréides et les Tritons, portant sur leurs épaules, comme lors d’un triomphe, la barque où, représentés en héros et en héroïnes, le progrès, la science et l’art donnent vie à la République, assise plus haute que tous, élevant une torche enflammée au-dessus de ses ailes. De chaque côté du jardin, depuis le grand palais jusqu’à la tour, il y a un palais pour l’or et les émaux, un autre pour les statues et les peintures, où il y a les paysages anglais de montagnes et d’animaux, les peintures gracieuses des Italiens, avec des paysans et des enfants, les tableaux espagnols de morts et de guerre, avec leurs silhouettes qui paraissent vivantes, et l’histoire élégante du monde dans les peintures de France. On l’appelle [le palais des] Beaux-Arts, et l’autre le palais des Arts Libéraux, qui sont ceux des ouvrages utilitaires, et tous ceux qui ne servent pas de simple décor. L’histoire de tout cela se voit là : de la gravure, de la peinture, de la sculpture, des écoles, de l’imprimerie. On dirait qu’il fonctionne, au travers de tout ce qui est parfait et raffiné, parmi les aiguilles et les rouages d’une horloge. Là on peut  voir, en cire miniature, des Chinois observant dans leur tour les astres du ciel ; ici se trouve le chimiste Lavoisier, en bas de soie et en justaucorps bleu, soufflant sur sa cornue, pour voir comment est faite le morceau de pierre qui est tombé sur terre depuis une étoile brisée et froide ; là, parmi les figures des différentes races humaines, ils sont assis par terre, travaillant le silex, comme ceux qu’on a déterré récemment au Danemark, entêtés et forts, les hommes de l’âge du bronze.


Première partieSeconde partie


Traduit de l’espagnol par Patrick Moulin @dsirmtcom.

Patrick Moulin, alias @dsirmtcom, juillet 2021.

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