José Martí, La Edad de Oro – III.4. Los zapaticos de rosa [Les petits souliers roses]

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Philosophie – Fiches de lecture

Fiches de lecture n° 36-III-4- José Martí, La Edad de Oro – Los zapaticos de rosa [Les petits souliers roses]


Sommaire

Présentation générale
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Los zapaticos de rosa [Les petits souliers roses]

À Mademoiselle Marie : José Martí

Il y a un beau soleil et une mer d’écume,
Et du sable fin, et Pilar
Veut sortir pour étrenner
Son petit chapeau de plumes.

– « Quelle divine petite fille ! »
Dit le père et il lui donne un baiser :
« Va mon oiseau captif
[Va] me chercher du sable fin. »

– « Je vais avec ma belle petite fille »,
La douce mère lui dit :
« Ne salis pas dans le sable
Tes petits souliers roses ! »

Les deux allèrent au jardin
À travers la rue du laurier :
La mère cueillit un oeillet
Et Pilar prit un jasmin.

Elle part avec tous ses jeux,
Avec son cerceau, son seau et sa pelle :
Le seau est de couleur violette :
Le cerceau est couleur de feu.

Ils viennent les voir passer :
Personne ne veut les voir partir :
La mère se met à rire,
Et un vieil homme se met à pleurer.

L’air frais décoiffe
Pilar, qui va et vient
Toute fière : –  » Dis, maman !
Sais-tu ce qu’est une reine ? »

Et si jamais elles reviennent la nuit
Du bord de mer,
Pour la mère et  pour Pilar
Tout de suite le père enverra la voiture.

La plage est très belle :
Tout le monde est à la plage :
Elle porte des lunettes, la gouvernante
De la française Florinda.

Il y a Alberto, le militaire
Qui est sorti du défilé
Avec un tricorne et une canne,
Lançant un canot à la mer.

Et quelle méchante, Magdalena
Avec tant de rubans et de noeuds,
Elle enterre dans le sable
La poupée sans bras !

Elles conversent là dans les chaises,
Assises avec les messieurs,
Les dames, comme des fleurs,
En dessous des ombrelles.

Mais c’est avec ces manières
Si sérieuses, que la mer est bien triste :
Ce qui est joyeux est là, au tournant,
Dans la ravine de tous !

On dit que les vagues sonnent
Mieux là-bas dans la ravine,
Et que le sable est très blanc
Où sont les petites filles seules.

Pilar court vers sa maman :
– « Maman, je vais être sage :
Laisse-moi aller seule sur le sable :
Là-bas, tu me vois, là-bas ! »

– « Cette petite fille capricieuse !
Il n’y a pas un après-midi où je ne me fâche :
Vas-y, mais ne mouille pas
Tes petits souliers roses. »

L’écume parvient à leurs pieds :
Les deux crient de joie :
Et elle s’en va, en disant au revoir,
Celle au chapeau de plumes.

Elle va là-bas, où c’est très loin !
Les eaux sont plus saumâtres,
Où sont assis les pauvres,
Où sont assis les vieillards !

La fillette alla jouer
L’écume blanche baissa
Et le temps passa, et passa
Un aigle le long de la mer.

Et quand le soleil se coucha
Derrière une montagne dorée,
Sans faire de bruit, un petit chapeau
À travers les sables, est arrivé.

Elle fait beaucoup d’efforts, elle s’efforce
À marcher : qu’est-ce qu’a
Pilar qui marche comme ça, qui va
Avec sa petite tête baissée ?

Elle le sait bien la jolie mère
Pourquoi cela lui en coûte de marcher :
– « Et les souliers, Pilar,
Les petits souliers roses ?

« Ah, petite folle ! Où sont-elles ?
Dis où, Pilar ! « – » Madame « ,
Dit une femme qui pleure :
“Elles sont avec moi : les voici !

« J’ai une fillette malade
Qui pleure dans la chambre obscure
Et je l’amène à l’air pur
Voir le soleil, et pour qu’elle dorme.

« La nuit dernière elle a rêvé, rêvé
Avec le ciel, et j’ai entendu une chanson :
ça m’a fait peur, ça m’a épouvantée,
Et je l’ai amenée, et elle s’est endormie.

« Avec ses deux bras menus
C’était comme une étreinte :
Et moi regardant, regardant
Ses petits pieds nus.

« L’écume a atteint mon corps,
J’ai levé les yeux et j’ai vu
Cette petite fille devant moi
Avec son chapeau de plumes.

-« Elle ressemble aux portraits
Ta petite fille !”  Elle a dit : “Est-elle en cire ?
Veut-elle jouer ? Si elle voulait !…
Et pourquoi est-elle sans souliers ?

« Regarde : la main la brûle,
Et elle a les pieds si froids !
Oh prends, prends les miens :
J’en ai d’autres à la maison !”

« Je ne sais pas bien, jolie dame,
Ce qui s’est passé ensuite :
J’ai vu aux pieds de ma petite fille
Les petits souliers roses ! »

On a vu sortir les mouchoirs
D’une russe et d’une anglaise ;
La gouvernante de la Française
A ôté ses lunettes.

La mère a ouvert les bras :
Pilar s’est jetée sur sa poitrine,
Et elle a sorti l’habit défait,
Sans ornements et sans nœuds.

Elle veut tout savoir
De la malade, la dame :
Elle ne veut pas savoir que pleure
De misère une femme !

-”Oui, Pilar, donne-les-lui ! Et cela
Aussi ! Ta couverture ! Ton anneau ! »
Et elle lui donna sa pochette,
Elle lui donna l’œillet, elle lui donna un baiser.

Elles reviennent silencieuses de nuit
Au jardin de leur maison :
Et Pilar va sur le coussin
Du côté droit de la voiture.

Et un papillon a dit
Qu’il a vu depuis son rosier
Conservés dans du cristal
Les petits souliers roses.


Traduit de l’espagnol par Patrick Moulin @dsirmtcom.

Patrick Moulin, alias @dsirmtcom, août 2021.

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