José Martí, La Edad de Oro – II.1.2. La historia del hombre, contada por sus casas [L’histoire de l’humanité, racontée par ses maisons] – Seconde partie

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Philosophie – Fiches de lecture

Fiches de lecture n° 36-2-1-2 José Martí, La Edad de Oro – La historia del hombre, contada por sus casas [L’histoire de l’humanité, racontée par ses maisons] – Seconde partie


Sommaire

Présentation générale
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La historia del hombre, contada por sus casas [L’histoire de l’humanité, racontée par ses maisons] – Seconde partie

Egypte – Source : gallica.bnf.fr

L’Égypte est comme le peuple parent du continent transatlantique : le peuple le plus ancien de tous ces pays “classiques”. Et la maison de l’Egyptien était comme était son peuple, gracieuse et élégante. L’Égypte était très riche, car le grand fleuve Nil était en crue chaque année, et avec la boue qu’il laissait en séchant, les récoltes poussaient très bien : les maisons étaient donc aussi en hauteur, par crainte des inondations. Comme il y avait là-bas beaucoup de palmiers, les colonnes des maisons étaient fines et hautes, comme les palmiers ; au-dessus du deuxième étage, il y en avait un autre sans murs, avec un toit plat, où ils passaient l’après-midi à l’air frais, regardant le Nil plein de navires qui allaient et venaient avec leurs voyageurs et leurs charges, et le ciel de l’après-midi, qui était couleur d’or et de safran. Les murs et les plafonds étaient remplis de peintures sur leur histoire et sur leur religion ; et ils aimaient tellement la couleur que même le tapis dont ils recouvraient le sol était fait de fils de différents coloris.

Maison des Hébreux – Source : gallica.bnf.fr

Les Hébreux ont longtemps vécu comme des esclaves en Égypte et ils étaient ceux qui savaient le mieux fabriquer des briques. Plus tard, lorsqu’ils ont été libérés, ils ont construit leurs maisons avec des briques brutes, comme nos adobes [briques d’argile et de paille], et le toit était fait de poutres en sycomore, qui était leur arbre préféré. Le toit avait un bord comme les terrasses, car avec la chaleur, les gens allaient dormir là, et la loi ordonnait qu’ils fassent les toits avec des murs, afin que les gens ne tombent pas au sol. Ils avaient l’habitude de faire leurs maisons comme le temple construit par leur grand roi Salomon, qui était carré, avec de larges portes en bas et étroites pour le commis [“por la comisa” (?)], et deux colonnes à côté de la porte.

Maison assyrienne – Source : gallica.bnf.fr

Sur ces terres vivaient les Assyriens, qui étaient un peuple guerrier, qui installaient des tours sur leurs maisons, comme pour voir l’ennemi de plus loin, et les tours étaient faites de créneaux, comme pour tirer à l’arc en toute sécurité. Ils n’avaient pas de fenêtres, mais la lumière leur venait du toit. Sur les portes, ils posaient parfois des pierres sculptées avec une figure mystérieuse, comme un taureau avec la tête d’un homme ou une tête avec des ailes.

Maison phénicienne – Source : gallica.bnf.fr

Les Phéniciens construisirent leurs maisons et leurs monuments avec des pierres brutes, qu’ils posaient les unes sur les autres comme les Étrusques ; mais comme ils étaient un peuple de navigateurs, qui vivait du commerce, ils ont bientôt commencé à imiter les maisons des peuples qu’ils voyaient le plus, qui étaient les Hébreux et les Égyptiens, et plus tard celles des Perses, qui ont conquis le pays de Phénicie par la guerre. Et ainsi étaient leurs maisons, avec l’entrée hébraïque, et la partie supérieure comme les maisons de l’Égypte, ou comme celles de la Perse.

Habitation des Perses – Source : gallica.bnf.fr

Les Perses étaient des gens de grande puissance, car il fut un temps où tous les peuples environnants vivaient comme leurs esclaves. La Perse est une terre de joyaux : les habits des hommes, les couvertures de chevaux, les poignées des sabres, tout cela était plein de bijoux. Ils utilisaient beaucoup de vert, de rouge et de jaune. Ils aimaient tout ce qui était avec beaucoup de couleur, très brillant et émaillé. Ils aimaient les fontaines, les jardins, les voiles de fil d’argent, les pierres fines. Aujourd’hui encore, les Perses sont ainsi ; et déjà à cette époque leurs maisons étaient faites de briques de couleur, pas avec un toit plat comme celles des Égyptiens et des Hébreux, mais avec une coupole ronde, comme pour imiter la voûte céleste. Dans une cour se trouvait la salle de bains, dans laquelle se dégageaient des odeurs très fines ; et dans les maisons riches il y avait des cours carrées, avec beaucoup de colonnes tout autour, et au milieu une fontaine, parmi des vases de fleurs. Les colonnes étaient faites de nombreux tronçons et de dessins, peints en couleurs, avec des bandeaux et des canaux, et le chapiteau était fait de corps d’animaux, avec un poitrail vert et un collier en or.

Maison hindoue – Source : gallica.bnf.fr

À côté de la Perse se trouve l’Hindoustan*, où est l’un des peuples les plus anciens du monde, qui a des temples d’or, travaillés comme on travaille le filigrane dans les orfèvreries, d’autres temples creusés dans la roche, et des figures de leur dieu Bouddha taillées au sommet de la  montagne. Leurs temples, leurs tombes, leurs palais, leurs maisons, sont comme leur poésie, qui semble être écrite en couleur sur de l’ivoire, et dit les choses comme parmi les feuilles et les fleurs. Il y a un temple en Hindoustan qui a quatorze étages, comme la pagode de Tanjore**, et tout est sculpté, des fondations à la coupole. La maison des hindous d’autrefois était comme les pagodes de Lahore ou celles du Cachemire, avec des toits et des balcons très ornés, avec de nombreux retours, et à l’entrée un escalier sans balustrade. D’autres maisons avaient des tourelles dans le coin, et la terrasse continue et sans tours, comme les Egyptiens. Mais la beauté des maisons hindoues était la fantaisie des ornements, qui étaient comme une tresse qui jamais ne finissait, faites de fleurs et de plumes.

Maison grecque – Source : gallica.bnf.fr

En Grèce, ce n’était pas ainsi, mais tout blanc et simple, sans luxe de couleurs. Dans la maison des Grecs, il n’y avait pas de fenêtres, car pour les Grecs, la maison était toujours un lieu sacré, où l’étranger ne devait pas regarder. C’étaient des petites maisons, comme leurs monuments, mais très belles et plaisantes, avec leur rosier et leur statue à la porte, et à l’intérieur un couloir de colonnes, où la famille passait ses journées, et n’allait qu’à la nuit dans les chambres, réduites et obscures. La salle à manger et le couloir étaient ce qu’ils meublaient, et cela avec de petits meubles : dans les murs ils mettaient dans des niches leurs jarres précieuses : les chaises avaient des filets sculptés, comme ceux qu’ils mettaient sur les portes, qui étaient larges en bas avec la corniche ornée de dessins de palmiers et de chèvrefeuille. On dit que dans le monde il n’y a pas d’édifice plus beau que le Parthénon, car il n’y a pas d’ornements là-bas comme chez ceux qui aiment la décoration, celle que font les ignorants dans leurs maisons et sur leurs habits, mais cette beauté vient d’une sorte de musique qu’on ressent mais qu’on n’entend pas, car les proportions sont calculées de telle manière qu’elles aillent bien avec la couleur, et il n’y a rien qui ne soit pas précis, ni de décor qui pourrait gêner. Il semble que les pierres de Grèce aient une âme. Elles sont modestes et comme des amis pour celui qui les voit. Elles entrent comme des amies par le cœur. Il semble qu’elles parlent.

Maison étrusque – Source : gallica.bnf.fr

Les Étrusques vivaient dans le nord de l’Italie, dans leurs douze cités fameuses, et ils étaient un peuple original, qui avait son gouvernement, sa religion, et un art similaire à celui des Grecs, bien qu’ils aimaient davantage l’impertinence et l’extravagance, et utilisaient beaucoup la couleur. Ils peignaient tout, comme les Perses ; sur les murs de leurs tombes, il y avait des chevaux avec la tête jaune et la queue bleue. Pendant qu’ils ont été une république libre, les Étrusques ont vécu heureux, avec de très bons maîtres en médecine et en astronomie, et des hommes qui parlaient bien des devoirs de la vie et de la composition du monde. L’Étrurie était célèbre pour ses sages, pour ses cruches d’argile noire, avec des figures en relief, pour ses statues et ses sarcophages de terre cuite, pour ses peintures murales et pour son travail du métal. Mais avec l’esclavage, ils sont devenus vicieux et riches, comme leurs propriétaires les Romains. Ils vivaient dans des palais et non dans leurs vieilles maisons ; et leur plus grand plaisir était de manger allongé pendant des heures entières. La vieille maison étrusque avait un étage, avec une terrasse à balustrade, et un toit fait d’auvents tombants. Ils peignaient sur les murs leurs fêtes et leurs cérémonies, avec des portraits et des caricatures, et ils savaient dessiner leurs personnages comme s’ils étaient vus en mouvement.

La maison des Romains ressemblait d’abord à celle des Étrusques, mais plus tard, ils connurent la Grèce et l’imitèrent dans leurs maisons, comme en tout. Au début l’atrium était la maison entière, et après ce n’était rien de plus que le portail, d’où on allait par un corridor vers la cour intérieure, entourée de colonnes, où donnaient les quartiers riches du seigneur, qui pour chaque chose avait un pièce différente : la salle à manger donnait sur le couloir, tout comme le salon et la chambre familiale, qui de l’autre côté s’ouvrait sur un jardin. Les murs étaient ornés de dessins et de figures aux couleurs vives, et dans les recoins se trouvaient de nombreuses niches avec des jarres et des statues. Si la maison était dans une rue très passante, ils faisaient des pièces avec une porte donnant sur la rue et ils les louaient pour des boutiques. Lorsque la porte était ouverte, on pouvait voir jusqu’au bout du jardin. Dans de nombreuses maisons, le jardin, la cour et l’atrium étaient entourés par une arcade. Rome devint ensuite maîtresse de tous les pays qui l’entouraient, jusqu’à ce qu’elle ait tellement de peuples qu’elle ne pouvait les gouverner, et chaque peuple se rendit libre et nomma son roi, qui était le guerrier le plus puissant de tout le pays, et vivait dans son château en pierre, avec des tours et des portails, comme tous ceux que l’on appelait “seigneurs” en ces temps de combat ; les travailleurs vivaient autour des châteaux, dans des cahutes misérables. Mais la puissance de Rome avait été très grande, et partout il y avait des ponts, des arcs, des aqueducs et des temples comme ceux des Romains ; du seul côté de la France, où il y avait beaucoup de châteaux, ils avaient construit de nouvelles fabriques, et surtout des églises, bâties comme s’il s’agissait à la fois de forteresses et de temples, ce qu’on appelle “l’architecture romane” et du côté des Perses et des Arabes, où se trouve aujourd’hui la Turquie, ils ont donné aux monuments tant de richesse et de couleur que les églises ressemblaient à des grottes d’or, à cause de leur grandeur et de leur éclat : de sorte que lorsque les nouveaux peuples du côté de la France ont commencé à avoir des villes. avec des portails sombres et de nombreux toits pointus, comme les églises romanes ; et du côté turc les maisons étaient comme des palais, avec des colonnes de pierres précieuses, un sol couvert de nombreuses petites pierres colorés, des peintures murales sur fond d’or, et des cristaux dorés : il y avait des balustrades dans les maisons byzantines faites avec un mélange de tous les métaux, qui luisait comme du feu : tant de décor dans les maisons était laid et pesant, leur donnant l’air d’une sépulture pour un homme vaniteux, maintenant qu’elles sont vides.

Maison arabe – Source : gallica.bnf.fr

Les Romains avaient également gouverné en Espagne ; mais les Maures sont venus ensuite pour la conquérir, ils ont construit ces temples qu’on appelle des mosquées, et ces palais qui paraissent sortis d’un rêve, comme s’ils ne vivaient déjà plus dans ce monde, mais dans un autre monde de dentelles et de fleurs : les portes étaient petites, mais avec tellement d’arcs qu’elles paraissaient grandes : de fines colonnes soutenaient les arcs en fer à cheval, qui se terminaient par un pic, comme s’ouvrant pour aller au ciel : le plafond était en bois fin, mais entièrement sculpté, avec leurs lettres maures et leurs têtes de chevaux : les murs étaient couverts de dessins, comme un tapis : dans les cours de marbre, il y avait des lauriers et des fontaines : ces balcons ressemblaient à l’étoffe d’un voile.

Avec les guerres et les réconciliations, ces peuples différents se sont rejoints, et quand le roi a été plus fort que les seigneurs des châteaux, et que tous les hommes ont cru au ciel nouveau des chrétiens, ils ont commencé à faire les églises “gothiques” avec leurs arcs en pointe, avec leurs tours comme des flèches qui atteignent les nuages, leurs portiques ouvragés et leurs fenêtres colorées. Et les tours étaient chaque fois plus hautes ; parce que chaque église voulait avoir sa tour plus haute que les autres ; ils construisaient les maisons de la même manière, ainsi que les meubles. Mais les décorations devinrent nombreuses et les chrétiens commencèrent à ne plus croire au ciel autant qu’avant. Ils parlaient beaucoup de la grandeur de Rome : ils célébraient l’art grec pour sa simplicité : ils disaient qu’il y avait déjà beaucoup d’églises : ils cherchaient de nouvelles façons de construire des palais : et de tout cela est né un mode de fabrication similaire à celui de la Grèce, qui est ce qu’on appelle l’architecture de la “Renaissance” : mais comme il y avait beaucoup de beauté dans l’art gothique de l’“ogive”, les maisons ne sont pas redevenues plus simples, mais ils les ont ornées avec des angles gracieux, des fenêtres hautes et des balcons élégants en architecture gothique. C’étaient des temps d’art et de richesse, et de grandes conquêtes, il y avait ainsi beaucoup de seigneurs et de marchands ayant un palais. Les hommes n’avaient jamais vécu, ni n’ont vécu à nouveau, dans des maisons aussi belles. Les peuples d’autres ethnies, dont on sait peu des Européens, ont combattu pour leur compte ou sont devenus amis, et ils ont appris leur art particulier les uns des autres, de sorte que l’on voit quelque chose des pagodes hindoues dans toute l’Asie, et il y a des pics comme ceux des palais de Lahore dans les maisons japonaises, qui ressemblent à des choses aériennes et pleines de charme, ou des maisons de jeu, avec leurs couloirs aux balustrades fines et leurs murs d’osier ou de nattes. Même dans la maison du Slave et du Russe, on peut voir les courbes mélangées et les toits en pointe des peuples hindous. Dans notre Amérique, les maisons ont quelque chose de romain et de mauresque, parce que le peuple espagnol qui a gouverné l’Amérique était maure et romain, et qu’il a démoli les maisons des Indiens. Il les a déracinées : il a démoli leurs temples, leurs observatoires, leurs tours de vigie, leurs maisons d’habitation, tout ce qui était indien a été brûlé par les conquistadors espagnols et ils l’ont détruit, excepté les chaussées, parce qu’ils ne savaient pas transporter les pierres que les Indiens avaient su déplacer, et les aqueducs, parce qu’ils leur apportaient de l’eau potable.

De nos jours tous les peuples du monde se connaissent mieux et se rendent visite : et chaque peuple a sa façon de construire, selon qu’il fait froid ou chaud, ou qu’il soit d’une origine ou d’une autre ; mais ce qui semble nouveau dans les cités, ce n’est pas leur manière de construire des maisons, mais que dans chaque ville il y a des maisons mauresques, grecques, gothiques, byzantines et japonaises, comme si commençait le temps heureux où les hommes se traitent en amis, et vont en se rejoignant.


Notes

* Hindoustan : sous-continent indien.

** Tanjore : Thanjavur.


Éléments contextuels – Première partieSeconde partie


Traduit de l’espagnol par Patrick Moulin @dsirmtcom.

Patrick Moulin, alias @dsirmtcom, mai 2021.

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